Il ne suffit pas de bien faire son travail. Il faut aussi savoir le vendre.
Cela représente 50% du succès.
Présenter un logo est une science, pas un art.
Et une science qui relève souvent de la psychologie, sans aller dans la manipulation ou autres extrêmes.
Si on devait imager la bonne et la mauvaise présentation d’un logo ça serait quelque chose comme ça :
Bonne : C’est là, où le client peut commencer depuis le début, en ayant le temps d’observer toutes les étapes de création, de réflexion et du chemin parcouru.
Mauvaise : Là où le client a juste le temps de regarder le logo et donner ses commentaires qui peuvent être influencés par de nombreux facteurs : son humeur, son travail en cours, etc.
Alors gardez en tête si vous vendez un produit tel qu’un logo, sa présentation serait certainement le packaging.
Je vais partager avec vous ma méthodologie, que j’ai élaborée en me basant sur mes propres erreurs et les problèmes que ça a pu déclencher avec certains clients.
La première règle d’or à retenir : ne jamais envoyer vos logos ou votre présentation en PDF par e-mail. Rien ne vaut une présentation du logo au client en face-à-face. Oubliez Skype aussi (sauf si vous êtes dans l’incapacité à vous déplacer).
Sommaire
Exploration
Expectations du client
Par quoi commencer sa présentation
Nombre de designs à présenter
Construire sa présentation
Exploration
Que vous soyez freelance ou salarié, le chemin parcouru entre la commande du logo et sa présentation reste le même dans l’ensemble. Vous devez avant tout comprendre le besoin du client. Pourquoi il a besoin d’un logo ou d’une refonte de son logo existant ? Quelle est son entreprise / organisation / projet / magasin ? A qui s’adresse-t-il ? Quel ton sera employé pour s’adresser à la cible ?
Gardez en tête que souvent votre client aura déjà certainement discuté avec son équipe/ ses collègues / ses proches de la nécessité du logo et il saura vous l’expliquer. Ce qu’il faudra extraire de lui comme informations supplémentaires, ça deviendra vos outils par la suite dans votre processus créatif.
La règle d’or : le plus d’information possible éviterait les confusions et les « j’avais pas compris ça comme ça » lors de la présentation et donc cela vous épargnerait aussi la baisse de votre crédibilité et de votre confiance en soi.
Personnellement, je demande souvent des exemples de logos que le client et son entourage (collègues, proches, etc.) aiment. C’est un exercice de réflexion qui peut être très bénéfique autant pour le client que pour vous. Car à partir des logos que votre client vous enverra, vous trouverez sûrement une cohérence ou une corrélation entre elles : des couleurs, des typos similaires, des icônes, des symboliques, etc.
Maintenant que vous avez exploré les envies et les aspirations de votre client, il vous faut regarder du côté de sa cible.
Je suis partisane de l’empathie en général. Mais quand on fait un métier de designer, l’empathie est cruciale. Car un design est destiné à être utilisé par quelqu’un. Si ce design ne parle qu’à vous, cela ne sert pas à grand chose. Quand on crée un logo, je dirais que c’est 50% de la satisfaction de votre client et 50% de satisfaction de ses clients à lui. Les proportions sont différentes si vous créez par exemple une affiche ou un site web. Mais le logo doit aussi plaire à votre client avant tout. Déjà, parce que ce logo il le verra tous les jours, il le portera avec fierté, il le mettrait dans tous ses e-mails etc. Donc beaucoup d’empathie pour votre client, mais aussi pour sa cible.
Pour ce faire, il vous faut comprendre la cible, ses envies, mais surtout ses besoins.
Questionnez votre client là-dessus : qui mieux que lui connaît ses clients ?
Ensuite, regardez du côté de la concurrence. Quels sont les points forts et les points faibles de leurs identités, sites web, réseaux sociaux, etc. Observez comment leurs identités visuelles vivent à travers tous ces supports.
En récoltant ces précieuses informations, vous serez munis de nombreuses armes pour commencer à travailler. Tout ceci vous permettra également de vous diriger dans la bonne direction, sans faire du hors-sujet.
Expectations du client
Comment votre client vous a trouvé-t-il ? Est-ce que vous lui avez été recommandé ? Est-ce qu’il a vu votre travail ? Est-ce que c’est vous qui l’avez sollicité ?
Dans tous les cas, il a déjà vu ou aperçu votre travail, vos projets ou vos créations, votre profil Linkedin peut-être ou votre site web. Donc il aura certainement quelques attentes concernant votre travail sur son logo. Et c’est normal, il vous paie pour votre expertise et votre savoir-faire.
J’ai déjà eu affaire à des clients inquiets, qui voulaient des croquis ou des « essais bruts » du logo en amont. Votre réponse doit toujours être négative à cette requête et je vais vous expliquer pourquoi.
Quand vous faites appel à un traiteur, vous ne demandez certainement pas de goûter à des plats inachevés, car vous aimeriez plutôt connaître le goût des plats finis qui seront dans les assiettes de vos invités à votre mariage, bat-mitzvah, ou autre heureux événement.
Ici, c’est pareil. On va pas montrer des croquis ou des essais, tout simplement parce que ça ne sert à rien. Cela ne va pas le rassurer sur votre niveau, parce que les essais ne le représentent pas. Et pire, cela peut vous embrouiller vous ainsi que le client et même lui faire peur.
Alors je vous encourage vivement à ne dévoiler vos designs qu’à la présentation officielle du logo.
Un autre point très important. N’oubliez pas que le client n’est pas un designer et donc n’essayez pas de faire appel à ses « sens graphiques ». Faites plutôt appel à sa perception. Mais surtout, expliquez votre travail, prouvez que votre savoir-faire et votre expertise valent son argent. Car au final, il vous paie pour ça.
Introduction de la présentation
Avant même de présenter toutes vos belles créations, il est important de rappeler à votre audience (le client seul ou son équipe, ses collègues, etc.) l’origine du projet.
Astuce : privilégiez les termes « projet de création », « création du logo » et évitez les termes « commande » ou « requête ». Montrez que vous êtes tous dans le même bateau et que vous êtes simplement là pour les aider à naviguer.
L’origine du projet, c’est quoi ? Et bien ce sont toutes les informations utiles que vous avez recueillis et établies ensemble avec le client au début. Complétez-les avec vos propres observations, vos recherches concernant la concurrence. Cela a pour but de rappeler le point de départ, d’appuyer les propos que vous allez tenir par la suite mais aussi cela rassurera le client sur votre capacité à comprendre sa demande.
Vous pouvez, par exemple, rappeler la cible, ses besoins et ses envies. Le message que l’entreprise veut porter à ses clients, avec quel ton employé, sur quels supports, etc. Il est important ici de rappeler au client l’information dont vous disposiez quand vous avez commencé à travailler sur le projet. Car, non seulement ça l’aidera à comprendre votre démarche créative mais aussi cela mettra à la page tout l’auditoire.
Nombre de designs à présenter
Quel est le nombre magique de designs à présenter au client ? Deux ? Dix ? Vingt ?
En tant que designers nous avons tendance à vouloir montrer toutes les idées et les créations que nous avons fait au client. Seulement, cela peut être contreproductif.
J’ai eu un client à qui j’ai présenté une dizaine de variantes de son logo. Je ne vous raconte pas le cauchemar que ça a été. Non seulement il n’a pas été capable d’en choisir un avec certitude, mais dans cette incertitude il m’a demandée plusieurs fois à modifier un truc par-ci un truc par-là et ça s’est terminé par le tranchage dans le vif et le retour vers la version 1 du logo déjà présenté. Mais quelle perte de temps ça a été autant pour moi que pour lui.
Pour aller dans l’autre extrême, si vous présentez seulement une seule version, car, pour X raison vous pensez que c’est « the design », le client aura l’impression que vous le lui imposez. Ce n’est pas très plaisant comme sensation et beaucoup de peine pour vous aussi.
Le nombre magique est le 3.
C’est parfait de tout point de vue. Du vôtre. Du client. De son cousin.
Pourquoi ?
Premièrement, c’est l’occasion pour vous d’explorer 3 différentes pistes créatives et les développer à fond. C’est beaucoup plus simple que d’en avoir plus que 3.
Deuxièmement, avec trois pistes vous offrez au client la possibilité d’en écarter une complètement. C’est beaucoup plus dur d’en écarter une si vous présentez que 2 pistes par exemple. Alors qu’avec 3, le client aura la possibilité d’en écarter une complètement et de se tâter quand même entre les 2 autres.
Et enfin, cela vous permettra de développer les 2 premières pistes en gardant les directives du client, de sorte à ce qu’il n’ait pas l’impression que vous faites du hors sujet, et expérimenter un peu plus avec la troisième piste. Si, par exemple, vous jugez avec votre œil de designer que sa demande est un peu éloignée de sa cible, vous pouvez essayer quelque chose qui vous semblerait plus approprié dans cette piste-là. Alors n’hésitez pas à présenter vos idées si vous pensez que vous avez raison.
Construire sa présentation
Je vous recommande de faire votre présentation sur Keynote ou sur PowerPoint, en ajoutant quelques petits effets de transitions, afin de rendre le tout agréable à visionner. Cela aussi montrera votre niveau d’implication et votre niveau en tant que designer en général. Ne vous contentez pas juste d’un PDF statique, qui pourrait endormir votre public. Nous sommes en 2020 tout de même, faire des présentations statiques c’est trop dépassé !
Ne sous-estimez pas le pouvoir du Keynote.
Revenons à ce que nous avons vu ci-dessus.
Nous avons donc l’introduction où vous rappelez à tout le monde la base du projet. Vous pouvez aussi parler de la palette de couleur (si elle existe déjà, si elle a été refaite ou si vous l’avez défini ensemble en amont).
Ensuite, les designs du logo : versions 1, 2, 3
Pour chaque design gardez la même logique. Ne mettez pas en valeur un design plus que d’autres (sauf si c’est volontaire de votre part 😈).
Voici le squelette de la présentation d’un design que je vous suggère :
On dévoile le logo sur un écran blanc.
Simple et efficace. Avec assez de marges pour lui laisser de l’espace à respirer. De cette manière le client aura le temps de bien le regarder, de l’apprécier à sa juste valeur.
La slide d’après doit être le même logo en plus petit sur un fond splité en 2 : sur un fond blanc en couleurs et sur un fond noir en blanc (ou une couleur de la charte graphique). C’est important pour le client qui ne pense pas forcément de comment le logo vivrait sur un fond de couleur.
Ensuite, on passe à la symbolique. J’adore cette partie, car c’est un peu comme dévoiler les coulisses de votre processus créatif. Votre réflexion, le point de départ et le point d’arrivée. N’hésitez pas à développer votre pensée avec des visuels. Une image vaut mille mots !
Vous pouvez dédier une slide au potentiel créatif que peut dégager le logo : icônes, illustrations, motifs, etc. Cela ajoute de la richesse à l’univers graphique de la marque.
Et pour finir, des mockups. Ne soyez pas fainéants, car ces mises en situations sont très importantes pour que le client valide votre design. N’oubliez pas que le client n’est pas un designer. Il ne verra pas forcément tout le potentiel créatif, les déclinaisons possibles du logo, ni sa dimension visuelle. Donc, on reste toujours dans l’accompagnement. Aidez-le à se projeter. Des mockups sont là pour vous aider.
Optez pour des mockups en rapport avec le sujet. Si c’est un logo pour un restaurant, imaginez un menu, un site web, des recettes, etc. Si c’est une agence de voyage, mettez le logo sur des cars, des véhicules, des kakémonos. Mais commencez toujours par de simples cartes de visite. C’est toujours plaisant pour le client de voir son logo à côté de son nom sur un produit « fini ».
Voici quelques liens pour des mockups que j’utilise en général pour présenter mes logos :
Soyez créatif, c’est une partie qui vous permet d’imaginer votre design sur différents supports et c’est génial ! Ça doit pas forcément refléter la réalité. Par exemple, pour imaginer le logo dans un site web, alors qu’il n’est même pas encore créé, vous pouvez très bien imaginer et designer une page d’accueil fictive et l’ajouter dans une mise en situation stylisée afin de lui donner un peu de vie.
Et on finit toujours par revenir sur le logo tout seul sur un fond blanc pour le rappeler au client, en mettant bien une pause afin qu’il puisse bien l’observer de nouveau, mais avec toutes les déclinaisons que vous venez de lui présenter.
Et voilà ! Vous appliquez ce chemin de fer à tous les 3 designs et c’est dans la boîte !
Pour finir votre présentation, vous pouvez mettre les 3 logos côte-à-côte sur une seule slide, afin que votre client se rende compte de leurs différences, leurs points forts et points faibles. C’est aussi à ce moment-là que vous pouvez ouvrir les débats, en invitant votre audience à donner leur avis sur les trois designs, de voter éventuellement.
Et n’oubliez pas de finir avec la dernière slide des remerciements.
Astuces et conseils supplémentaires
Si vous ne savez pas comment démarrer votre présentation, vous pouvez commencer par présenter son sommaire. De cette manière vous préparez votre audience à ce qui les attend.
Si vous ne souhaitez pas être interrompu pendant votre présentation, n’hésitez pas à préciser que vous allez d’abord présenter vos pistes et qu’à la fin il y aura la phase de débats.
Interagissez avec votre public. Vous pouvez par exemple, essayer de faire deviner au client quelle symbolique se cache derrière le logo, avant de la dévoiler et de l’expliquer en détails. Cela vous aidera à garder l’attention de votre public et aussi à confirmer l’idée même du logo.
Faites des pauses quand vous présentez vos designs, afin que le client ne soit pas dérangé dans ses pensées concernant le design qu’il est en train d’observer pour la première fois. Laissez-le l’apprécier pendant un bref instant. Pas trop long par contre !
Utilisez les métaphores et les termes communs, sans trop user du vocabulaire de designer. Ou alors si vous préférez l’utiliser, expliquez-le. Car il n’y a rien de pire quand votre public ne comprend pas ce que vous êtes en train de raconter.
Voilà pour les conseils que je peux vous donner. J’espère que cet article vous sera utile. Si vous avez des questions ou si vous avez vos propres astuces de présentation, je serai ravie de les apprendre.
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